Entrée en Zambie.

Je reprends la suite de mon voyage ce 11 février 2015 quelques kms après la frontière entre la Tanzanie et la Zambie.  Le passage de la douane s'est passé sans problème mise à part que, pour le paiement cash du visa (50 dollars), la dame n'acceptait pas les petites coupures ( 1 et 2 dollars) ni les euros.  Par conséquent il a  fallu changer des euros en dollars à un taux très favorable pour le changeur (un euro pour un dollar) ... mais j'étais coincé!  Je ne suis pas resté longtemps à cet endroit, "assailli" par une dizaine de changeurs ... quant aux bureaux de change "officiels", ils étaient fermés !

La conduite en Zambie (ex Rhodésie du Nord) est pareille à celle de la Tanzanie ... toujours à gauche !  En revanche, beaucoup moins de circulation : fini les bus roulant comme des fous et beaucoup moins de camions ! Selon les explications reçues, les bus assurant la liaison Lusaka / frontière Tanzanienne voyageraient de nuit et en fin de journée ... libérant la route pour les lèves-tôt comme moi ! Les vélos sont toujours autant chargés ... et les gens toujours souriants; fini le swahili ("Jambo") mais la plupart des gens connaissent l'anglais ... au moins "How are you ?", "Where are you going ?"

Ce 11 février après-midi, je suis bien installé dans un camping attenant à une école de formation en agriculture tenue par un couple de Sud-Africains qui y ont imprimé leur sens de l'organisation.  Douches chaudes ... et oui, il suffit d'installer des panneaux solaires ... le soleil africain étant tellement généreux!  C'est la saison des pluies ... et malgré tout il y a eu du soleil tous les jours depuis mon entrée en Zambie !
 
Mise à part dans les villes, il est très difficile de se ravitailler : presque pas de restaurants et presque rien à se mettre sous la dent ... quant aux débits de boissons, il y en plein ... autant que d'endroits où l'on vend des recharges de GSM (il y a des recharges à partir d'un demi Euro !)  Ici les gens ont tous un GSM. 

J'ai entendu une dame travaillant dans une bananeraie, téléphoner avec son GSM... sans doute pour faire la causette avec une autre dame dans un champ de maïs.  Ce sont les opérateurs qui se frottent les mains !  Les maisons où l'on vend des recharges sont entièrement repeintes dans la couleur (verte, rouge, bleu) de l'opérateur.  Cela donne aux petites villes traversées des airs de "Far West". 

Une nuit passée à côté de la maison d'une famille Zambienne

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Vendredi 13 février, faute de trouver une "Guest house" au bord de la route, je m'adresse à une dame habitant avec sa famille de neuf enfants à 100 mètres de la grand route; par chance, une jeune étudiante passant par là me sert d'interprête. De suite la dame accepte que je plante la tente aux abords de la maison.  

La tente est déjà dressée en présence des enfants de la famille et de tous ceux des familles voisines, lorsque le papa rentre du travail.  Il me sert longuement la main, une main vigoureuse de ... charbonnier (comme beaucoup d'autres en zone rurale, il produit, entre autre, du charbon de bois pour la cuisine).  

 Il parle un peu anglais et il est très heureux d'accueillir pour la première fois un "muzungu", un blanc dans sa maison.

Des lunettes trouvent ici une seconde vie

Ayant pris en réserve en cas de perte une paire d'anciennes lunettes cassée en deux, celle-ci fera un heureux : le papa me dit qu'il ne sait plus lire de près faute de lunettes.  En moins de deux, un fil de cuivre permet la réparation ... le papa, fidèle lecteur de la bible en tant qu'adepte de l'église Adventiste du 7ième jour, pourra continuer à lire ce livre ... où il a sans doute puisé les bonnes raisons de la qualité de son accueil.
 
Quant à la maman, elle est au four et au moulin; elle active le feu pour que je puisse chauffer de l'eau ... pour mon repas lyophylisé (poulet curry); elle me donne un bassin d'eau pour la toilette;  elle puise de l'eau au puit, elle prépare le millet ... et le soir un bon repas africain. 

La nuit tombe vers 18h15 et l'on se réunit (les hommes et les garçons dehors près de la tente, la maman et les filles dans la case cuisine) pour partager le plat traditionnel africain (dont je vous donnerai le nom dans le prochain message) que l'on mange en le malaxant dans sa main avant de le tremper dans la sauce.  Un peu de viande pour ce jour de visite.  Les morceaux auxquels je n'ai pas touché, sont rapidement partagés par les enfants ... sans gaspillage aucun.  Les biscuits que j'offre sont un dessert inhabituel.  La petite dernière met un quart d'heure pour sucer le biscuit qu'elle a reçu.
 
Pas d'électricité mais la radio sur piles diffuse de la musique zambienne; les grands ont un gsm ... il n'y a pas de réseau mais il permet de faire des photos (du muzungu).  Heureusement il y a un chargeur solaire!  La nuit est déjà tombée depuis une heure, les femmes et les enfants des familles voisines continuent à venir chercher de l'eau au puit communautaire.
 
Le matin, les coqs se chargent de nous réveiller bien avant le lever du jour (c'est Danielle qui serait contente!)  La tente démontée, c'est le départ ... le papa m'accompagne un bout de chemin avec une des filles sur le porte-paquet vers le centre de santé : elle a la malaria!  Nous nous quittons ... la joie née d'une rencontre exceptionnelle ... et éphémère se lit sur nos visages.

"Mwashibukeni" ... un petit mot magique pour entrer dans le coeur des Zambiens

La soirée passée chez mes hôtes d'une nuit m'a permis d'apprendre deux mots et une question (bonjour, merci, comment allez-vous?) en Bemba, la langue parlée dans cette partie Nord et orientale de la Zambie.  "Mwashibukeni" cet mot à utiliser le matin car il signifie "bon jour", déclenche une très grande joie chez les personnes rencontrées.  

Quelle différence avec les jours précédents quand j'utilisais la langue de Shakespeare ... les visages s'illuminent, les gens de toutes les générations apprécient ce "muzungu" qui connait un mot de leur langue !  Certains rient et applaudissent; d'autres mettent la main à la poitrine; ils voudraient bien continuer la conversation mais pour moi ce n'est pas possible d'aller plus loin ... dommage !

Rencontre avec Benedikt "von Deutchland"

P1090938.JPGL'après midi, un motard me dépasse et s'arrête.  Chargé comme il est, avec deux pneus de rechange, ce ne peut être qu'un "safariste" !  C'est Benedikt ... "comme le Pape" dit-il en se présentant ... enfin plutôt comme le pape précédent, originaire comme lui du Sud de l'Allemagne.  

Cinq mois pour traverser en solitaire (tiens, tiens, je ne suis pas le seul!)  la plupart des pays de la partie australe et orientale de l'Afrique (Namibie, Botswana, Zambie, Tanzanie, Kenya, Malawi, Zimbabwe, Afrique du Sud).  Echange d'adresses, photos ... Avant de repartir, Benedikt me demande si je ne manque de rien (eau, etc). 

En se quittant, je lui souhaite bon "safari", ce qui en Swahili signifie "voyage" ... et pas seulement comme nous (touristes et agences de voyage) le pensons, visite de parcs nationaux animaliers.

A la recherche d'un camping introuvable à la nuit tombée

Pour l'étape du samedi 14 février, les Sud-Africains du camping précédent m'avaient indiqué un camping se trouvant théoriquement à 70 km avant d'arriver à la ville de Mpika.  Une très longue journée pour y arriver, heureusement sur un parcours facile (plus de descentes que de montées), 130 kms (sur la même journée !) pour arriver à un endroit ... où finalement, il s'avère qu'il n'y a pas de camping!

Mais heureusement, la nuit africaine étant déjà tombée (18h30), les gens me disent d'aller à l'école;  là, je trouve deux gardiens de nuit qui, très gentillement m'indiquent un endroit qui ne risque pas d'être inondé (car maintenant il pleut).  Les gardiens ont allumé un feu ... dont les braises toutes rouges réchaufferont l'eau pour mon menu lyophilisé (des pâtes au saumon ... délicieuses ... merci Danielle!)

Le matin, mes deux amis se réchauffent auprès du feu.  J'ai passé une très bonne nuit (il est vrai qu'en deux jours, j'ai dépassé les 200 kms!)  Je les quitte non sans oublier de les gratifier pour m'avoir permis de passer la nuit à cet endroit providentiel ... et cela en toute sécurité!

Rencontre d'un couple en voyage en Afrique à moto à la recherche d'un endroit merveilleux pour s'installer.

P1100026.JPGMardi 17 février 2015.  Deux motos me dépassent.  Les conducteurs portant un gilet fluo et un casque et roulant à allure modérée ... cela ne peut pas être des Zambiens!  

Daniel(de Suisse) et Mélissa (d'Australie) sont partis pour 5 mois de découverte de l'Afrique; ils ont loué des motos (légères) au Kenya ... alors que Benedikt voyageait avec sa grosse moto allemande qu'il avait expédié par bateau en Namibie.

Daniel et Mélissa semblent avoir trouvé l'endroit idéal où ils comptent vivre leur vie de couple : dans le Sud de la Tanzanie, au bord de la mer ... un endroit idyllique pour ouvrir une "Guest house" ... où l'on risque d'être bien accueillis, vu la gentillesse de ceux qui se sont donnés la peine de s'arrêter pour me saluer. 

Comme moi, ils trouvent que les Zambiens sont vraiment charmants et gentils ... des "g(Z)ens bien" quoi !

Une nuit et un jour de repos auprès des chutes de Kundalila

En quittant la route nationale asphaltée, 13 kms d'une route secondaire me (nous ... car il y a le vélo) redonnent le contact avec le sable, ce qui me rappelle les Andes (2009 et 2013).  Ma monture n'apprécie pas tellement ce genre de revêtement et se cabre de temps en temps.  

P1100176.JPGHeureusement celui-ci est solide la plupart du temps et j'arrive rapidement avant la nuit, après une journée de 108 kms dans un "camp site", un endroit où je peut monter ma tente (car il n' y a pas de Simbas!)  Le gardien de ce Parc National, après les formalités d'usage, me montre le chemin pour descendre au pied des chutes ... merveilleux site où j'ai choisi de me reposer 24 heures.  

C'est là que je continuerai à lire l'autobiographie de Nelson Mandela ... "on the road again with him" !  A 7 heures, comme convenu, le gardien me guide jusqu'au pied des chutes; il reste quelques instants avec moi pour regarder ce que je continuerai à admirer seul (voir photo).  

En remontant, je croise une dizaine de Chinois, des travailleurs dans un des nombreux projets (routes, agriculture, etc) qu'ils supervisent en Zambie comme dans plusieurs autres pays Africains(à l'exception du Rwanda parait-il ?)  Certains sont indisciplinés  en grimpant à un endroit dangereux pour prendre une photo et se font rappeler à l'ordre par le guide.  

Un jour -  hélas - l'Afrique leur appartiendra  ...  Nelson Mandela, parmi ses multiples préoccupations et engagements y avait-il pensé ? ... Its' a long way to freedom

La nuit suivante, ayant planté ma tente à un endroit isolé, aux abords d'une voie de chemin de fer, je me réveille pour écrire mes mémoires de la Transafrica profitant d'une insomnie.  Soudain, dans la nuit noire Africaine sans lune, un lointain vrombissement m'annonce l'arrivée d'un long train de wagons de marchandises, en route vers Dar-Es-Salaam sur l'Océan Indien.

L'expérience de l'agriculture productiviste

Vendredi soir, trempé comme un canard par un orage sub-tropical, je cherche refuge dans une ferme ... surprise, depuis longtemps (je n'étais plus habitué), j'aperçois une dame blanche dans sa voiture: c'est la fermière, née en Zambie de parents fermiers blancs, qui accepte que je plante la tente auprès de la ferme.  

Quant son mari (d'origine Sud-Africaine) me voit, de suite, il me fait entrer dans un appartement annexe où je puis passerai la nuit non sans avoir partagé le repas du soir avec les parents et les trois enfants.  n accueil différent dans cette Afrique que je découvre depuis peu ... avec ici, un accent "Afrikaans" rappelant un passé chargé en conflits, guerres, douleurs dans ce pays si cher à Mandela ...  

P1100341.JPGQuant au style d'agriculture dans ces fermes tenues par des blancs mais aussi par de plus en plus par des noirs : production de maïs, blé, etc à grande échelle avec utilisation de pesticides, désherbants chimiques et "fertilizers" chers aux multinationales agro-alimentaires (voir les photos) ... et de plus en plus présentes sur les deux côtés de la route en nous rapprochant de Lusaka, la capitale de la Zambie. 

Productivité et profit sont à l'ordre du jour de ces projets financés entre autre par l'Union Européenne et la FAO.  Mais a côté de cela que deviennent les petits paysans ... et leurs préoccupations sont-elles au moins prises en compte ? Pas sûr !

La Transafrica 2015 : un premier bilan au 2/3 du voyage.

Les jours se suivent sans nouvelles exceptionnelles ... et me voilà, ce lundi 23 février 2015, sur le point d'arriver à Kabwe, lieu de rendez-vous avec le Père Pierre Ruquoy qui travaille à "l'intérieur" des terres comme on dit au Brésil, à deux heures de route de Kabwe.  Comme c'est la saison des pluies, il a choisi bien gentillement, ce que j'apprécie énormément, de venir me chercher en 4x4 car, étant donné que c'est la saison des pluies, la route non asphaltée doit être très pénible (voir impraticable) à vélo.
 
Premier bilan : Rwanda, Burundi, Tanzanie, Zambie (limité à Kabwe) = 31 jours de vélo, 2.266 kms parcourus en 186 heures et 8 minutes pour être précis; moyenne 12,1 kms/h; aucune crevaison (ce sont des pneus allemands "Schwalbe Marathon Plus" réputés increvables ... en effet); aucun ennnui technique, une seule blessure légère à la cheville due à la rencontre malencontreuse d'une pédale ... le moral quant à lui étant toujours intact !

Réponses aux questions

Réponses aux questions concernant les animaux.  A la première question du message précédent, j'ai eu les réponses suivantes : un gnou, un okapi.  Soit 9 réponses exactes dont deux avec la précision suivante "un gnou bleu".  A la seconde question, trois réponses vraisemblablement erronée (civette, genette) et trois apparemment exactes ("serval hindei", précision oblige!).  Merci à celles et ceux qui se sont donné la peine de répondre.
 
Quant à la question de savoir ce qu'il en est du suivi du "socialisme à l'africaine" de Julius Nyerere en Tanzanie, le fils de Nicole (une des trois cyclistes de Namur-Assise 2014), qui a travaillé en Tanzanie et qui parle le Swahili, nous apporte les précisions suivantes (un tout grand merci):
 
" L'héritage que Nyerere a laissé à son pays est une paix sociale et surtout une paix tribale  (à comparer au Kenya où il y des affrontements après chaque élection.)  Malheureusement, économiquement le modèle n'a pas tenu toutes ses promesses.  (Il faut dire qu'il n'a jamais reçu de soutien international non plus).  Une raison parmi d'autres: après avoir attaqué le régime ougandais de Idi Amin, la Tanzanie a injustement dû payer les coûts de cette guerre.  Si Nyerere est toujours aussi présent dans les mémoires, c'est plus pour ses politiques sociales que pour ses résultats économiques, mais aussi il est le "Baba wa Taifa", le père de la patrie, fondateur de TANU (le parti politique qui s'est battu pour l'indépendance).  A noter que le président actuel (Kikwete), ainsi que tous les anciens présidents, sont du même parti que Nyerere..."

Prochain message

Merci pour vos nombreux messages (une cinquantaine en deux semaines) ... le prochain, ce sera dans une semaine chez le Père Ruquoy et l'orphelinat "the Sunflowers" en Zambie.  Concernant les photos attachées ou non aux messages.  Certains, semble-t-il ne recevraient pas les photos en attaché ... sachez qu'elles sont visibles, quelques jours après l'envoi du message, sur ce blog.

Léon Tillieux