" On n'abandonne jamais un travail qu'on a commencé "

Eugène Christophe, 1913, Sainte-Marie de Campan

Du temps du coureur Eugène Christophe, il y avait sans doute déjà des drogues mais pour ce courageux, il n'y en a qu'une !

Chers amies et amis de la Transpyrénéenne,

Pour celles et ceux qui ne savent pas ce que FLT signifie, c'est simple : c'est Faulx-les-Tombes où je réside (quand je suis en Belgique).  Tout a une fin et cette Pyrénéenne qui se termine, se termine bien en fait.  Pas d'accident, pas de problème de santé (mon coeur va - encore - très bien) et pas de problèmes techniques (crevaison, roue voilée, etc.)

Rencontres et souvenirs divers

Un Argentin craignant l'orage

Pour ces rencontres, l'avantage de parler plusieurs langues me permet de communiquer avec la plupart des cyclo-randonneurs.  C'est ainsi que, alors que j'étais dans la descente du col d'Aspin, je croise un cyclo-randonneur, hispanophone résidant en Espagne mais Argentin d'origine me demande s'il pourra atteindre le sommet du col avant l'orage ? Moi, j'ai eu la chance de rencontrer le fermier et sa "bétaillère" (cfr. message précédent)... j'espère pour lui qu'il a pu se mettre à l'abri des bourrasques de vent et des trombes d'eau qui sont mainte fois les caractéristiques des orages en (haute) montagne.

Le souvenir d'Eugène Christophe

En arrivant à Sainte-Marie-de-Campan, le souvenir d'Eugène Christophe est bien visible sur un monument commémoratif dans ce petit village.  Rappelons-nous qu'en 1913, l'infortuné coureur cassa sa fourche à 10 km de ce village où il y avait un forgeron, nommé Joseph Bayle pour être précis.  Selon les règlements très stricts de l'époque, le coureur pouvait réparer mais sans aide aucune du forgeron.  Il réussit à repartir mais perdit le Tour de France vu le retard accumulé, alors qu'il était passé en tête du col du Tourmalet lors de la très longue étape Bayonne-Luchon, longue - excusez du peu - de 326 km !  Toutefois, il a laissé dans ses mémoires une maxime qui peut encore 100 ans après, nous aider à toujours choisir d'affronter l'adversité envers et contre tout : "On n'abandonne jamais un travail qu'on a commencé".  Il est vrai que maintenant les règlements de ce fameux Tour de France ont bien changé.  Si un coureur a la moindre petite poussière qui "ennuie" son dérailleur, dans les 10 secondes qui suivent, un mécano lui glisse un nouveau vélo sous le postérieur... avec en plus une belle "poussette" - permise tiens, tiens - au même endroit !  De plus avec la technologie moderne et les oreillettes, les coureurs sont avertis des moindres faits et gestes des concurrents.  Et comme ils sont payés parfois par des marques qui sentent même le pétrole (Émirats Arabes), ce ne sont plus les concurrents qui décident du déroulement de la course mais les intérêts (business is always business !) de ces sponsors dont les représentants - qui ne sont peut-être jamais monté sur un vélo et par conséquent n'ont jamais "suquelé" dans la montée d'un col - sont sans aucun doute bien assis dans leurs fauteuils en train de suivre l'évènement à la télé...!  Un siècle auparavant, c'était un brave forgeron qui encourageait le coureur - seulement en le regardant - lequel n'avait peut-être jamais manipulé une pince de forge (il était toutefois serrurier) !

Petite ajoute sur la stupidité - passée et actuelle - de certains règlements

Dans l'histoire du coureur malchanceux, celui-ci écopa malgré tout d'une pénalité de 10 minutes alors qu'il avait réparé sa fourche sans l'aide du forgeron mais les juges de l'époque avaient bien noté que le fils du forgeron avait actionné le soufflet de la forge.  Cela me donne l'occasion de rapprocher ce fait, d'histoires (vraies) qui datent du "dernier" confinement... qui comme chacun sait ne date pas de Mathusalem.  En avril 2020, alors que les citoyens français ne pouvaient se déplacer à pied chaque jour de plus d'un kilomètre autour de leur domicile (sauf pour ceux qui avaient l'autorisation écrite pour aller travailler), il nous a été rapporté que certaines personnes ont dû payer une amende salée pour avoir parcouru 200 mètres (pas kilomètres) de trop.  De même notre coureur belge Philippe Gilbert écopa lui aussi d'une amende parce que - à l'entrainement, à Monaco (tiens oui, c'est la France !) - il avait parcouru 40 km (quarante vous lisez bien... pas 400 !) ... soit 3 fois de trop selon le - stupide faut-il le dire - règlement... ! Incroyable dans un pays appelé France... Jean Ferrat aurait bien fustigé cela dans sa célèbre chanson "Ma France" censurée sur les ondes en 1968 !

Un soirée partagée dans un camping avec deux Bruxellois sympas

Vendredi 10 juin, je me "paie" quand même un camping pour communiquer facilement avec mon petit cousin Pierre, le fils de l'infortuné Hubert, qui vient à ma rencontre pour l'ascension du dernier col de la Transpyrénéenne.  Il est presque nuit lorsque les deux campeurs m'invitent à prendre un verre auprès de leur motor-home.  Nous échangeons nos souvenirs et rencontres le long des routes de nos voyages.  Il en est qui comme moi voyagent avec presque leur maison sur leur monture... il en est qui n'ont que très peu de bagages, parfois à peine un sac de couchage sans tente.  Comme cette jeune allemande parcourant à pied le très bel intinéraire allant de Biarritz à Toulouse, appelé "la vélo-route de la Garonne"; cette jeune randonneuse avait sur elle un sac de la grosseur d'un sac d'écolier.  Je l'ai vu sortir d'un cimetière... où - comme moi - elle allait remplir sa gourde.  Elle a sans doute dû traverser plusieurs villages avant de trouver une boulangerie ouverte !

Le dernier col : le col de Port

Samedi 11 juin, 9h55, comme ils l'avaient prévu, Pierre et ses deux fils, Nicolas et Mattéo, arrivent à vélo au camping "le Puech" de Massat en Ariège.  Pour alléger ma monture, une partie des bagages est répartie entre les trois cyclos.  Vient la montée du dernier col de la Transpyrénéenne qui ne nous fera pas trop transpirer car le pourcentage n'est que de 5 à 6% et car la route est souvent ombragée.  Photo-souvenir au sommet du col; puis les deux jeunes Nicolas et Matéo s'en vont dans la descente rapide (c'est ce qu'ils préfèrent) ... le papa leur ayant recommandé de lancer la cuisson des saucisses pour le repas de midi.   Précisons que pour l'apéro, Nicolas avait déniché au bord de la route une grande bouteille (pleine) de bière belge des Ardennes... !  Saurat est en vue ; ce petit village ariégeois m'accueille pour quatre nuits récupératrices !

Avec Nicolas, Pierrot et Mattéo arrivés au col de Port 1.249 mètres - samedi 11 juin 2022

Le marché du village à Saurat

Dimanche 12 juin au matin, c'est le marché comme chaque dimanche.  J'accompagne Pierrot qui vend son miel, fruit de son travail (il a des centaines de ruches qu'il change de place selon les saisons : miel des fleurs de printemps, des fleurs de montagne d'été, des rhododendrons, du tilleul, de la bruyère, etc.)  Pierrot connaît pas mal de monde dans le village et écoule aisément son miel.  Celui de 2020 est déjà considéré comme "périmé" et donc invendable par les très spécialistes français de l'équivalent de l'AFSCA belge (Agence Fédérale pour la Sécurité de la Chaîne Alimentaire).  Mais quelle stupidité, le miel se bonifie comme le Porto.  Pierrot me dit que le miel trouvé en Egypte datant du temps des pyramides est un des meilleurs que l'on puisse trouver ! Décidément "Ma France !!"... surenchérirait Jean Ferrat !

Sur la place du village, un jeu de piste parents-enfants est organisé sur le thème de l'alimentation, qui consiste à retrouver les différents ingrédients du chaudron magique caché dans les platanes.

Pierrot me présente le maire du village.  Je lui dis que Saurat est le village natal d'une de nos tantes : Alice Feraille-Jauze, d'origine française, qui habita longtemps à Haltinne et qui a vécu jusqu'au début de sa centième année en 2017.

Les diverses tâches d'un producteur de miel

Lundi 13 juin 2022, j'accompagne Pierrot dans ses diverses tâches ; un producteur de miel de mars à novembre a des journées bien remplies.  Aujourd'hui, avec sa compagne, il extrait d'abord le miel récolté ce printemps ; ensuite, il lance l'appareil qui remplit les pots avec un dosage au gramme près.  Hier soir, il y a eu un orage mais comme le temps est redevenu beau, nous partons dans la montagne, mettre les "hausses" aux ruches pour que les abeilles puissent les remplir du fruit de leur travail.  Car par ces temps d'été précoce, cela bourdonne à qui mieux mieux !  Dans les montagnes proches d'Andorre et de l'Espagne, les abeilles buttinent les fleurs de Rhododendron... et le miel est très apprécié par les acheteurs.  Nous partons avec un camion chargé de 140 hausses que Pierrot ajoutera à la plupart des 144 ruches disposées dans 3 zones haut perchées de la montagne.

Pique-nique en montagne

Lundi 13 juin 19h, la famille Leman m'invite à gravir un montagne toute proche en haut de laquelle subsistent les ruines du château de Calamès.  Il y a deux ans, un industriel voulait raser la moitié de cette montagne pour en faire des matériaux pour les routes et la construction.  Un comité local se constitua et empêcha le projet de se réaliser; ils gagnèrent surtout que cette montagne est en zone "Natura 2000"... l'engagement citoyen peut mettre "halte là" à des appétits de businessmen si peu respectueux de la "Terre" !

Au sommet, nous arrivons avant le coucher du soleil.  Nous pique-niquons non loin des ruines du château qui appartenait au 13ème siècle au Comté de Foix et qui fut délaissé dès le 14ème siècle suite à un conflit avec les Royaume de France et d'Aragon.  Comment a-t-on pu amener tant de pierres pour construire cet édifice de défense ?  Réponse de Pierre : "ils avaient des esclaves à l'époque !" Quand nous redescendons, il fait déjà nuit.  Demain, l'école et le travail attendent mes hôtes.

Du haut de la montagne, vue plongeante sur la vallée du Saurat et dans le fond sur Tarascon-sur-Ariège

La grotte de Bédeilhac

Pour visiter cette grotte située à 3 km de Saurat, il est recommandé de se vêtir d'un polar vu que la température est de 12 degrés dans cette grotte.  Les contemporains de l'homme de Cro-Magnon, alors qu'ils étaient nomades ont laissé des traces : des peintures d'animaux (bison, cheval) et même l'empreinte de leur main.

Le retour via Toulouse, Paris, Maubeuge et le RAVeL longeant la Sambre

Pour aller chercher le train de retour, il me reste deux jours à pédaler sur un terrain moins pentu dont une partie le long du canal du midi.

Quelques belles images de la Transpyrénéenne

Un rapace dans un ciel bleu

Rencontre en début d'escalade dans la montagne proche de l'Espagne : l'Isart, emblème des Pyrénées

 

Futur grimpeur du Tourmalet ?    Un "vrai béret basque"... selon le porteur !

Paysage montagnard

Coucher de soleil non pas andin mais pyrénéen