M05 Transvietnam 2025 - de Hanoï (Hà Nội) à Huế
Par Léon le mardi 20 mai 2025, 10:21 - Transvietnam 2025 - Lien permanent
Coucher de soleil sur les montagnes de la baie d’Along terrestre
Merci à celles et ceux qui ont réagi à mon message M04 que vous avez reçu alors que je revenais à Hà Nội après une boucle de 600 km dans les montagnes du Nord du pays.
Deuxième rencontre d'un cycliste longue distance : Sven, jeune originaire des Pays-Bas qui arrive du Sud, de Hô Chi Minh-Ville. Échanges très intéressants de nos voyages passés, notamment en Ouzbékistan, Tadjikistan et Kirghizistan. Des conseils pour planter la tente ... cela m'intéresse toujours!
Ce jeudi 20 mars au matin, nous prenons la direction de l'hôpital. J'ai rendez-vous avec un médecin car depuis près de deux semaines, je souffre d'une infection au niveau des bronches. Mes amis prénommés Huệ (qui signifie fleur de Lys) et Cường (force et résistance) m'y conduisent. Il s'agit d'un très grand hôpital, l'hôpital franco-vietnamien où nous nous perdons dans les différents niveaux et services. Après une attente pas trop longue, je suis reçu par une jeune dame médecin qui me prescrit des antibiotiques et d'autres médicaments. En principe, en huit jours je devrais être guéri … !
De retour chez mes amis, je dresse la liste des médicaments à prendre ainsi que la posologie. Une fois cela fait, c'est le moment du départ. Cường m'accompagne avec son VTT pendant les premiers kilomètres jusqu'à ce que la route vers le Sud numéro 1A soit atteinte. Il s'agit de la "route mandarine" ... qui doit vraisemblablement son nom au fait que les Chinois sont passés par ici plus que de coutume en s'y installant à leur gré. Un peu comme les Romains chez nous en Europe il fut un temps ! Il en résultat des routes que l'on utilise encore aujourd'hui. Ici au Vietnam, les routes nationales sont dans un bon état. Comme il y a une bande réservée aux deux roues, je me sens en sécurité. Attention parfois certains usagers deux-roues viennent en sens contraire pour une courte distance. En ville, il y a beaucoup de motocyclettes ; comme tous conduisent à peu près à la même vitesse, il n'y a pas trop d'accrochages. Je n'en ai pas vus ... sauf une moto à terre et en mauvais état ... que j'ai photographiée sous l'œil étonné des "rwêtants" !
Cường m'accompagne au début de la route "Mandarine"
Ce jeudi 20 mars au soir, pour dresser la tente, je suis le conseil de Sven, le cyclo-randonneur rencontré la veille au bord d'un lac célèbre de Hà Nội. Je pénètre dans une propriété de ce que je crois être un temple. Il s'agit d'une très grande maison avec des dépendances. Le propriétaire - par gestes - me permet d'y dresser ma tente et d'y passer la nuit. Il m'indique où se trouvent les toilettes et me donne un masque. Avec son épouse, il essaye de me faire comprendre quelque chose. Impossible ! L'essentiel c'est d'avoir trouvé un endroit pour la tente ... et il fait nettement moins froid que dans le Nord du pays ! Au petit matin, mon hôte me fait visiter la maison ... remplie de richesses de l'époque coloniale française et de celle qui l'a précédée : la chinoise. Mais quelle surprise : une toile représentant le sacre de Napoléon ! J'ignorais que l'on se souvenait encore de ce "petit" tyran aussi loin de Paris un peu plus de 200 ans après ce sacre. Je me demande si dans deux siècles il y aura encore une trace au Capitole de l'investiture de Trump II ... en espérant qu'il n'y aura pas de numéro III ni de clone présidentiel du même genre qui lui succédera ... l'on ne sait jamais avec le développement de l'IA ?
Belle ... cette maison d’accueil !
Etrange ce personnage au Vietnam !
Hồ Chí Minh-Ville (ou Saïgon) à 1.680 km... allez encore quelques coups de pédale !
Les rotules commencent petit à petit à me faire moins mal. C'est l'atmosphère vietnamienne qui pénètre doucement!
Une trentaine de km pour arriver à ce que l'on appelle la "baie d'Along terrestre'". Ce vendredi 21 mars, visite du site reconnu par l'UNESCO : Trang Han. Visite en bateau pendant trois heures sur une barque actionnée par les bras courageux d'une dame ... pour quel salaire pour un travail long, répétitif et pénible? Elle seule pourrait me répondre ... mais le vietnamien "non è facile come l'italiano !" Le nombre très élevé de touristes a au moins l'avantage pour la population locale, de créer un nombre impressionnant d'emplois ... surtout féminins. La visite se fait en compagnie de deux jeunes filles espagnoles ... histoire de se remettre à l'espagnol. La Colombie et l'Équateur ... c'était il y 5 ans, juste avant la COVID 19 !
La baie d’Along terrestre Trang Han
Cherchant un endroit pour planter la tente, je risque le coup en demandant à un jeune paysan qui rentrent ses chèvres. C'est ma chance .... il est d'accord. Coucher de soleil imprenable sur les montagnes au même profil que celles de la baie d'Along. Pendant la nuit, j'entends des voix ... ce sont les chèvres qui se demandent qui peut bien dormir si près de chez elles ?
Levé tôt, j'arrive avant le flot de touristes pour la visite du second site, celui de Tam Coc. Le temps est au sec. Très vite la brume se lève. Seconde visite avec vues sur des montagnes semblables comme la veille à celles de la baie d'Along ... avec en plus le cadeau d'un soleil généreux. Aujourd'hui, je suis seul avec le pagayeur ... qui rame avec ses pieds ... comme les pêcheurs du lac Inle en Birmanie mais ici il utilise les deux pieds.
Comme au lac Inle en Birmanie ... mais avec les deux pieds
Reprenant la route, je suis invité dans une ville à pénétrer dans le chapiteau où se prépare un mariage. Je repars avec des boissons et des biscuits. Le soir, un peu de recherche et j'installe ma tente sur une plateforme en béton en surplomb des rizières ... au moins, c'est plat ! Le voisin donne son accord et s'inquiète si j'ai quelque chose à manger ! La nuit, les "habitant.e.s" du coin se font entendre en ... croassant. Le matin, parti avant le lever du jour, le soleil fait soudainement son apparition ... une belle journée (de rencontres) s'annonce.
Ce dimanche matin 23 mars, vers 10h30, je me suis approché d'une petite église catholique en zone rurale qui a été construite en 1993. Le curé et des laïcs, prénommés Joseph (leur prénom ,"resté secret" reçu au baptême), parlant l'anglais m'ont invité à un repas vietnamien délicieux : potage, légumes, poissons, fruits de mer ... et du riz bien sûr, sur un plateau tournant sur une table ronde. De la bière vietnamienne pour agrémenter cela. Plusieurs fois au cours du repas, les convives cognent leur verre en se souhaitant "bonne santé" ... Ce que j'ignore encore en vietnamien ! Une chose est certaine : ce délicieux repas m'a regonflé dans tous les sens du terme.
Le soir dans le même ordre d'idée, j'aperçois au loin une église. En m'approchant, je me rends compte qu'elle est en complète restauration. Les ouvriers qui terminent leur journée me signalent un endroit où je puis dresser ma tente. C'est sans compter sur les responsables paroissiaux, arrivés pour la messe du soir ... qui m'envoient p...... ailleurs. Toutefois un des jeunes ouvriers, sans en référer aux "supérieurs", m'invite à le suivre et me propose une chambre avec matelas et couverture dans une maison à 500 mètres de l'église pour y passer la nuit. En fait, c'est là qu'ils dorment durant la durée du chantier. Ils m'offrent du riz et des sardines grillées ainsi que de petits morceaux de volaille ... et une bière Saïgon alors qu'eux s'offrent "plus d'une" rasade d'alcool … de riz vraisemblablement. A propos de ce genre d'initiative qui vient de la base plutôt que de la hiérarchie, un proverbe malgache dit que "c'est par le fond que la marmite commence à bouillir ... !" Comprenne qui pourra ... ! Ce fut un dimanche de chance, accueil et partage(s) au menu !
Ce lundi 24 mars, parti très tôt, à midi, j'ai déjà parcouru 50 km. Dans la ville de Vinh, je me trompe et prends une mauvaise direction. Perdu, je demande l'aide d'un pompiste qui quitte sa station d'essence pour me ramener sur le bon chemin. Il m'a attendu juché sur sa moto, durant une très longue distance, certainement entre 5 et 10 km, pour être sûr de me ramener sur la nationale 1 vers Huế... et cela gratuitement ! Avec un beau sourire ... convaincu de ne pas avoir perdu son temps !
Aujourd'hui encore, j'ai été impressionné par le nombre d'églises qui apparaissent à l'horizon parfois avec leurs tours jumelles ... l'on se croirait à s'y méprendre dans les Hauts de France, dans la Beauce chartrienne ou non loin des décors bréliens de la mer du Nord de notre cher plat pays, s'il n'y avait les rizières au vert éclatant et les étangs où viennent se prélasser quelques buffles fatigués.
Quant à moi, ce mardi soir 25 mars, je vais pouvoir me reposer des 90 km parcourus ce jour car j'ai eu l'audace de demander l'accueil dans une paroisse dont j'apercevais l'église monumentale de bien loin. Trois jeunes étudiants présents prennent l'initiative de me répondre positivement en l'absence du curé de la paroisse. Smartphone auto-traducteur aidant, je comprends que ma demande est acceptée par ces jeunes (16-18 ans) en train d'aménager les plantations du jardin jouxtant l'église. Un repas (nouilles vietnamiennes au goût prononcé autant que délicieux) m'est offert et c'est requinquant ! Vers 19 h, dans l'église voisine retentissent les chants de l'office du soir. L'église est pleine. A la sortie, dans la pénombre, la file des confessions est longue. Comme au petit matin - dès 4h50 ... bravo les lève-tôt - pour la messe quotidienne à laquelle je participe également ... cela me rappelle les années 1960 au collège diocésain de Bellevue à Dinant-sur-Meuse, où, à 6h20 (pas à 4h40 ! heureusement) du matin, à jeun, nous descendions en rangs silencieux à la chapelle pour la messe du matin ... avant 50 minutes de d'étude (c'était bien car nous avons appris à travailler) et ... enfin, le petit-déjeuner ! Ici, les femmes - un peu plus nombreuses dont certaines habillées de leur longue belle robe moulante et colorée - sont à droite et les hommes - chemise blanche - à gauche. Remarque concernant l'inculturation du catholicisme au Vietnam : au moment de la consécration, c'est le gong bien asiatique qui retentit. Visiblement, ce Vietnam en est encore peut-être à une époque préconciliaire ... quoique à chaque pilier, est accroché un écran affichant les textes des chants. Rappelons-nous que durant les années 1962-1965, c'était les années dures du régime communiste au Vietnam ... et d'une guerre interminable (il a fallu attendre 1975 avec le départ de Saïgon de l'armée étasunienne). Actuellement après avoir longtemps été interdite, la pratique du culte est ré-autorisée depuis quelques années déjà. Ce que dit le Routard à propos de la pratique "assidue" du Rosaire à laquelle les catholiques vietnamiens s'accrochent encore est bien vrai quand on voit l'assistance fidèle et nombreuse des fidèles (adultes, adolescents et enfants) à la messe quotidienne bien avant le lever du jour ... et la journée de travail. Ce qui m'a surtout impressionné dans cet accueil, c'est que des jeunes catholiques "pratiquants" ici au Vietnam, décident d'accueillir un étranger en l'absence de leur pasteur et qu'ils ne pouvaient contacter malgré leur smartphone ... et je leur dis : "évangéliquement et humainement chapeau, les gars ! Il n'y a pas d'eau chaude dans la chambre où j'ai passé une bonne nuit mais l'important c'est la chaleur de votre coeur !"
église monumentale à la française
Il est intéressant de rappeler que l'histoire de l'évangélisation de ce qui s'appelait le Tonkin et l'Indochine, a été menée principalement par des missionnaires français dès le 16ème siècle, alors qu'étaient bien présents et intégrés depuis des siècles, le Confucianisme, originaire de Chine et le Bouddhisme venant de l'Inde. Cette évangélisation de la région continua à être organisée alors que la recherche avide de territoires nouveaux - surtout à partir de 1858 (en 1867, la Cochinchine devient colonie française) - aux richesses convoitées par le système colonisateur français, comme ce fut le cas dans les autres continents du Sud par la plupart des nations européennes et nord-américaines y compris la Belgique. Les deux guerres mondiales du 20ème siècle, les nombreuses luttes de décolonisation - dont celle du Vietnam - et celle que nous sommes malheureusement en train de revivre, ne sont que les conséquences de ces luttes entre les nations pour s'approprier les richesses du sous-sol et autres ... sans respect aucun de ces pays et de leurs populations. Il y a bien sûr d'autres raisons que, par exemple Poutine et Trump ... et d'autres encore (Netanyahou … un autre triste exemple) s'évertuent à poursuivre ... ce qui meuble l'actualité... que je ne puis suivre que de loin, je le reconnais.
En ce qui concerne la langue Vietnamienne, c'est un jésuite portugais appelé Francisco de Pina (1585-1625) qui modifia l'alphabet en utilisant les lettres de nos langues européennes en y ajoutant une accentuation subtile pour tenir compte des différentes variations de sons ... comme pour distinguer Huế, la ville, du prénom Huệ, qui s'écrit de la même manière mais avec des accents différents. Il est dès lors beaucoup plus facile de lire le vietnamien que le Chinois ! Il faut néanmoins un traducteur ! Les inventeurs des smartphones y ont pensé … quitte à « fainéantiser » les candidats interprètes !
Un matin, j'avais aussi été ravitaillé par des jeunes garçons de moins de 12 ans qui m'avaient tout simplement donné de petites bouteilles d'eau ... en se disant : "celui-là, il doit avoir soif !" Également une fille d'une douzaine d'années qui m'a donné un soda ! Belles initiatives ... avec le sourire en plus !
Ravitaillement en eau avec le sourire ... à la sortie de l'école !
Vous me demanderez vraisemblablement quand j'ai le temps de rédiger ces comptes-rendus de voyage après avoir parcouru près de 90 km, c'est que, couché avec les poules (ou les chèvres) dès 20 heures, vers 2 h du matin, l'insomnie me rattrape ... et j'écris ... en espérant que cela vous intéresse ou parfois vous interpelle ? Si vous constatez que vous n'avez pas reçu un ou plusieurs messages précédents, veuillez me le signaler à ltarchives@hotmail.com ... mon smartphone ne me permet pas de retrouver aisément la liste d'envoi créée sur mon ordinateur avant le départ .. d'où des oublis involontaires. Vous êtes en effet très nombreux à me suivre.
Ce jeudi 27 mars, 7 h du matin. Dans la brume, un paysan conduit son troupeau de vaches dans les champs. Une paysanne arrose son champ aux parcelles de légumes rectilignes ... avant la chaleur de ce jour : la température montera jusqu'à 34 degrés !
Ce vendredi 28 mars : arrivée à Huế... une belle partie de la route vers Hồ Chí Minh-Ville (alias Saïgon) est - déjà - parcourue. Mais au moment où je replie la tente, un paysan venant vérifier l'arrivée d'eau à sa rizière me salue en m'offrant un sourire éclatant comme le soleil qui déjà sort de la brume matinale.
Petite mésaventure ce matin, après avoir replié la tente plantée sur un sentier entre deux champs de riz, je suis reparti erronément vers Hà Nội, vers le Nord. Mais très vite le sens de l'orientation qui m'aide souvent m'a rappelé que le matin, au Vietnam, le soleil n'est pas à droite de la route ... d'où demi-tour !
La visite de cette belle et intéressante ville d'Huế vous sera décrite dans mon prochain message.
La ville de Huế est en vue
Léon Tillieux au Vietnam